Le Conseil de Bank Al-Maghrib, qui s’est déroulé le mardi 18 mars, a pris la décision marquante de réduire une nouvelle fois, pour la seconde fois consécutive et la troisième depuis le mois de juin dernier, le taux directeur de 25 points de base, le faisant tomber à 2,25 %. Cette orientation découle d’une analyse approfondie de la stabilité de l’inflation, avec des anticipations des experts pouvant s’étendre à un taux moyen de 2,2 % pour le premier trimestre de 2025, avec une projection de 2,4 % sur 12 trimestres, comme l’a souligné M. Abdellatif Jouahri.
Cependant, il est crucial de noter que cette décision n’est pas uniquement le reflet d’une situation pour le moins stable sur le plan inflationniste. Elle vise également à renforcer le soutien de la banque centrale à l’activité économique en particulier à l’emploi, un enjeu de taille dans un contexte économique en perpétuelle mutation.
Par ailleurs, il est essentiel d’entendre les mises en garde du gouverneur, qui mentionne sans détour la dégradation de la situation géopolitique. Il souligne : « Malgré les tensions géopolitiques croissantes et les politiques monétaires restrictives, l’économie mondiale a fait preuve d’une résilience relative en 2024. » En effet, les prévisions indiquent un ralentissement de la croissance économique mondiale, qui passerait de 3,2 % en 2024 à 3 % en 2025, avec une projection encore plus basse de 2,8 % en 2026. Ces déclarations alertent sur un climat économique mondial en turbulence, notamment en Europe, marqué par une dynamique de « guerre économique » où la reconfiguration de l’économie vers les besoins de défense devient inéluctable.
Dans ce contexte, la réorganisation économique est plus que pertinente, impliquant une mobilisation des ressources autour de la production d’armements et d’équipements militaires nécessaires. L’envisagement de scénarios de guerre, jadis tabou, impose une reconsidération des mécanismes de financement, alternant emprunts et nouvelles politiques monétaires.
D’autre part, la politique monétaire durant ces périodes de tensions est d’une complexité redoutable. Elle doit impérativement réévaluer ses objectifs primordiaux afin de maintenir la stabilité économique et d’anticiper les fractures économiques potentielles. La nécessité de financer l’effort de guerre se juxtapose à l’impératif de préserver la confiance des investisseurs et des acteurs économiques. Les taux d’intérêt doivent être ajustés à la baisse pour dynamiser l’économie, tout en conservant un équilibre fragile face à l’instabilité.
Il s’avère également que la Banque Centrale Européenne, lors de sa réunion survenue le 6 mars, a décidé de poursuivre son assouplissement en abaissant ses trois taux directeurs pour la cinquième fois consécutive, illustrant l’optimisme croissant que le processus de désinflation dans la zone euro avance sans entrave. Les taux sont désormais établis à 2,50 %, 2,65 % et 2,90 %, respectivement.
La Réserve Fédérale des États-Unis, quant à elle, a décidé de faire une pause, marquant un arrêt après trois baisses consécutives. Elle maintient la fourchette cible pour les taux d’intérêt fédéraux inchangée, à [4,25 %-4,50 %], dans un contexte d’inflation relativement élevée. Ce positionnement est dicté par les trois principaux objectifs de la FED : promouvoir une économie robuste, stabiliser l’inflation et veiller à un taux de chômage en dessous des limites acceptables.
Actuellement, les politiques monétaires des banques centrales influentes comme la BCE et Bank Al-Maghrib reflètent les risques politiques omniprésents dans le monde occidental. Il existe des voies indirectes par lesquelles la BCE peut s’immiscer dans la politique monétaire du Maroc, impactant ainsi l’économie nationale par le biais des taux de change, des investissements étrangers, et des flux de capitaux.
Face à cette conjoncture, la décision de Bank Al-Maghrib de baisser les taux directeurs n’est guère surprenante. En somme, « mieux vaut prévenir que guérir ». Cette stratégie pourrait bien s’avérer cruciale alors que l’incertitude domine la scène économique mondiale.