Fitch, l’agence de notation, y va de ses prévisions : une baisse des dépenses publiques semble inéluctable. Pour la période 2024-2026, celles-ci devraient représenter environ 25,7 % du PIB, enregistrant ainsi une baisse par rapport aux 26,4 % de 2023. Ce recul serait principalement attribuable à la diminution des coûts liés à la reconstruction après le séisme dévastateur de 2023, mais également à une contraction des subventions, déjà amorcée. En mai 2024, le gouvernement a franchi le pas en augmentant de 25 % le prix des bouteilles de gaz butane subventionnées, et d’autres baisses de subventions concernant le gaz, le sucre et le blé sont à prévoir. Toutefois, des chocs externes pourraient obliger les autorités à réévaluer ces décisions, mettant ainsi en péril leurs efforts de réduction du déficit.
Une hausse des dépenses sociales en perspective
Dans un registre contrastant, les dépenses sociales devraient connaître une augmentation d’environ 1,4 point de pourcentage du PIB durant la même période, par rapport à 2023. Pourquoi cette hausse ? Elle trouve son origine dans l’extension des allocations chômage aux travailleurs indépendants, la création d’un nouveau régime d’allocations familiales prévu pour fin 2023 et l’élargissement de l’assurance maladie de base, instaurée en 2022. Ces nouvelles mesures visent essentiellement à apaiser les tensions sociales qui pourraient surgir d’une réduction des subventions.
Recettes fiscales et innovations financières à l’horizon
Quant aux recettes, Fitch prévoit qu’elles représenteront en moyenne 21,9 % du PIB entre 2024 et 2026, une légère baisse comparée aux 22,2 % de 2023. Les recettes fiscales, en particulier, pourraient subir une chute de 0,5 point de pourcentage, accentuant la nécessité d’une réforme fiscale. Celle-ci, qui viserait à simplifier les taux de l’impôt sur les sociétés et de la TVA, devrait avoir un impact neutre, les hausses étant compensées par des diminutions ailleurs.
Le gouvernement marocain table sur des « financements innovants » pour augmenter ses recettes, espérant qu’ils atteindront environ 2,1 % du PIB entre 2024 et 2026, contre seulement 1 % entre 2019 et 2023. Ces mécanismes incluent la vente et le leasing d’actifs publics, qui sont devenus des outils utilisés depuis 2019 pour contrer les déficits budgétaires. Cependant, Fitch met en garde : ces financements ponctuels ne sauraient se substituer aux sources de revenus pérennes, cruciales pour une consolidation budgétaire durable.
Perspectives et risques à surveiller
Envisager une réduction significative et durable de la dette publique par rapport au PIB pourrait revitaliser la notation souveraine du Maroc. Fitch projette que la dette connaîtra une légère diminution, passant de 70,2 % du PIB en 2024 à 69,7 % en 2026, mais cela reste bien au-dessus de la médiane de 55 % pour les souverains classés BB. Les prévisions de déficit budgétaire établies par Fitch semblent plus mesurées que celles du gouvernement, qui vise un déficit de 3 % du PIB d’ici 2026. Une réduction rapide du déficit pourrait se concrétiser si les dépenses sociales sont inférieures aux anticipations, si la réforme fiscale stimule efficacement la mobilisation des recettes, ou si la croissance économique dépasse les prévisions moyennes de 3,3 % par an pour la période en question.
Pour conclure, bien que le Maroc fasse état d’importants progrès dans la réduction de son déficit budgétaire, les défis demeurent redoutables pour établir une véritable consolidation budgétaire à long terme, selon Fitch Ratings.