L’ambition gouvernementale s’inscrit dans une volonté claire : rehausser l’État social en dynamisant l’emploi tout en maintenant un équilibre macroéconomique fragile. Cette nécessité pressante émerge de l’inquiétante réalité du chômage, qui atteint des sommets vertigineux avec 1.683.000 demandeurs d’emploi au 3e trimestre 2024, traduisant un taux alarmant de 13,6%, selon les statistiques du HCP. « Nous aspirons à bâtir un modèle économique marocain plus engageant et inclusif, en garantissant une répartition équitable des opportunités d’emploi, notamment dans les zones rurales et les territoires défavorisés», souligne Hassan Edman, éminent professeur d’économie et de gestion à la Faculté des sciences juridiques, économiques et sociales d’Agadir.
Dans cette lignée, le PLF 2025 s’articule autour de l’expansion des initiatives d’emploi actif, accentuant l’inclusion des jeunes, en particulier ceux identifiés comme NEET (Ni en éducation, ni en emploi, ni en formation) tout en soutenant les très petites et moyennes entreprises (TPME). Parmi les projets, on notera la création d’un fonds d’investissement public conséquent, des réformes fiscales, et une assistance renforcée aux TPME, véritables piliers de l’emploi au Maroc. Une enveloppe de 14 milliards de dirhams est allouée à la lutte contre le chômage des jeunes, avec des mesures ciblées pour intégrer ceux issus des quartiers défavorisés ou des zones rurales. Younes Sekkouri, ministre de l’Inclusion économique, de la Petite entreprise, de l’Emploi et des Compétences, a ainsi annoncé un programme d’intégration des NEET au sein du marché du travail, qui, dans sa première phase, visera 212.500 jeunes.
«À partir de maintenant, ces jeunes souvent exclus des programmes d’emploi classiques pourront bénéficier du contrat Idmaj, un dispositif de réinsertion leur offrant des exonérations fiscales et divers avantages sociaux aux entreprises qui les embauchent», précise le professeur Edman. De plus, un programme de formation vise à préparer 100.000 jeunes par an, contre seulement 25.000 aujourd’hui, dans des secteurs innovants tels que le numérique ou la transition énergétique. Grâce à cette initiative, ces jeunes auront l’occasion d’acquérir une précieuse expérience tout en recevant une rémunération.
«Ce modèle de formation a pour but de s’aligner sur les exigences spécifiques des employeurs tout en veillant à doper l’employabilité des jeunes dans les secteurs en pleine expansion», ajoute l’expert. Le gouvernement compte également renforcer les services d’orientation pour aiguiller les jeunes vers des possibilités en adéquation avec leurs compétences et les besoins du marché. À cette fin, un réseau extensif de points d’accueil et d’orientation sera déployé sur l’ensemble du territoire. Dans cette dynamique de stimulation de l’emploi, les TPME, qui constituent plus de 95% de la structure économique marocaine tout en générant plus de 50% des emplois pour les jeunes, occupent une place centrale dans cette stratégie, s’imposant comme un vecteur essentiel de l’État social. Le PLF met un accent tout particulier sur leur développement, en instaurant des mesures de soutien direct pour faciliter leur passage dans le formel et leur structuration, en plus d’un financement de 12 milliards de dirhams proposé.
Nadia Fettah, ministre de l’Economie et des Finances, a annoncé qu’un futur décret vise à renforcer la Charte d’investissement en faveur des TPME. Pour Hassan Edman, la mise en œuvre efficace de ces dispositions doit s’articuler autour des défis de l’emploi et de l’inclusion sociale de façon durable, sans pour autant compromettre d’autres mesures de soutien aux prix et au pouvoir d’achat. Le dilemme se pose avec acuité : promouvoir l’emploi tout en maintenant une inflation soutenable !