L’annonce marquante de la transformation juridique de l’Office national des aéroports (ONDA) en Société anonyme n’est pas une surprise. En fait, il s’agit d’un développement qui s’inscrit dans une dynamique déjà amorcée par diverses entreprises publiques. Alors, qu’en est-il réellement de l’intérêt et des avantages que cette mutation peut engendrer pour ces entités publiques?
C’est un fait indéniable : le statut public accordé à l’ONDA était lié à un éventail d’activités orchestrées par l’État, qui nommait systématiquement le président ou le directeur général. Toutefois, chaque office présente son propre périmètre d’action. Par exemple, l’Office des Changes, qui supervise la conformité des régulations en matière de change tout en s’assurant de leur bonne application par les acteurs économiques concernés.
D’autres entités, telles que le Groupe OCP, l’ONEE, le CDG, l’ONCF, Al Omrane et ADM, ont des rôles économiques cruciaux à l’échelle nationale, qu’il s’agisse d’activités commerciales, de services ou industrielles. Leur succès repose largement sur une gestion efficace, se traduisant par des états financiers et des résultats palpables. Quand ces résultats sont satisfaisants, ils profitent aux offices ; néanmoins, lorsqu’ils ne le sont pas, c’est l’État, principal actionnaire, qui se trouve contraint de pallier à ces lacunes, impactant ainsi son budget.
Dans ce contexte, la réorganisation des offices a été catalysée par leur conversion en Société anonyme, leur octroyant une certaine autonomie vis-à-vis de leur actionnaire, les rendant responsables de leur propre équilibre économique et financier. C’est dans un cadre où l’État s’engage dans des réformes structurelles – y compris les réformes sociales, souvent gourmande en budgets – que cette transformation prend tout son sens.
Ainsi, la majorité des offices se sont affranchis de la “tutelle” de l’État en adoptant le statut de SA, généralement associé au secteur privé, bien que l’État demeure leur actionnaire principal. Cela les soumet à la législation régissant les SA, les obligeant à respecter des normes de gouvernance et de transparence strictes. Ces exigences se déclinent en deux modèles : d’une part, la traditionnelle SA avec Conseil d’administration et un PDG, et d’autre part, la récente formule d’une SA dotée d’un Conseil de Surveillance, présidé par un Président, et d’un Directoire constitué de membres choisis parmi les actionnaires, supervisant le management. Dans les deux cas, les règles de gouvernance et de transparence sont clairement énoncées par la loi, garantissant ainsi une transparence à tous les niveaux et imposant des exigences opérationnelles, dont la publication régulière des états financiers — annuels, semestriels ou trimestriels.
Cette restructuration offre à la SA une voie plus aisée vers le financement extérieur, permettant ainsi de libérer l’actionnaire de toute contribution exceptionnelle.
C’est, au fond, l’intérêt majeur pour les offices publics de se transformer en sociétés anonymes : élargir et diversifier leurs sources de financement tout en se détachant d’une dépendance financière à l’égard de l’État. Toutefois, cette transition requiert qu’ils justifient de leur activité et de ses perspectives à travers des plans d’affaires à moyen terme, afin de répondre aux exigences inhérentes des investisseurs privés auxquels ils aspirent à s’adresser via le marché des capitaux.
Dans les faits, une société anonyme a la possibilité de recourir à des émissions obligataires dans le but d’attirer des institutionnels privés en quête de titres attractifs, bien rémunérateurs.
Parallèlement, le marché des capitaux est structuré autour de la Bourse de Casablanca, qui représente une plateforme pour ces sociétés anonymes d’explorer d’autres modes de financement, tel que l’introduction en bourse. Effectivement, une société anonyme peut choisir de s’introduire en bourse en cédant une fraction de son capital à des actionnaires institutionnels et à des individus, le tout au gré d’un prix par action fixé par la société et mis à la disposition du grand public dans le cadre d’une offre publique de vente. Néanmoins, il est crucial de noter que si cette introduction sur le marché valorise la société, elle constitue également une condition préalable pour que les SA financent leur croissance par le biais d’augmentations de capital ou d’émissions obligataires.
Dans le cas de l’ONDA, qui prévoit d’importants investissements en infrastructures aéroportuaires, son passage au statut de SA pourrait très bien s’accompagner d’une introduction en Bourse de Casablanca, lui ouvrant ainsi les portes nécessaires à l’accès à ces modalités de financement tout en renforçant ses fonds propres. D’ailleurs, l’ONDA a un modèle à suivre, celui de Marsa Maroc, qui a su naviguer vers un financement extérieur non conventionnel, délaissant le financement classique, celui des banques.
La Bourse de Casablanca se tient prête à accueillir des grandes entreprises publiques sur ses tablettes, élargissant ainsi son éventail d’entreprises cotées, et l’introduction de l’ONDA serait le signe d’un nouveau chapitre…