Après l’annonce inattendue de la diminution du taux directeur par Bank Al-Maghrib en juin, un nouvel élan se dessine pour le crédit bancaire. Les données monétaires de septembre illustrent clairement un regain d’activité sur tous les segments, confirmant que l’assouplissement des politiques monétaires a pénétré profondément le tissu bancaire. Cette dynamique a ouvert la voie à une baisse des taux d’intérêt, un réel avantage pour les emprunteurs. La réduction de 25 points de base du taux directeur en juin a, comme prévu, provoqué un abaissement des taux appliqués par les banques dans le courant du troisième trimestre 2024. D’après la récente enquête trimestrielle de Bank Al-Maghrib, le taux débiteur global s’établit désormais à 5,21 %, en recul par rapport à 5,43 % à la même époque en 2023.
Concernant les types de crédit, les taux se déclinent ainsi : 5,08 % pour les facilités de trésorerie, 5,26 % pour les crédits à l’équipement, 5,24 % pour les prêts immobiliers, et 7,06 % pour les crédits à la consommation. Au 30 septembre 2024, l’encours total des crédits bancaires a dépassé le cap symbolique des 1 100 milliards de dirhams. En l’espace de neuf mois, le secteur bancaire a octroyé plus de 22 milliards de dirhams, traduisant une augmentation de 4,9 % par rapport à l’an passé. Les crédits alloués au secteur non financier affichent une progression de 3,3 %, alors que ceux destinés au secteur financier s’envolent de 13,4 %, témoignant d’une dynamique économique vigoureuse.
Sur le front des crédits immobiliers, après deux années de stricte régulation, les institutions financières commencent à relâcher leur emprise. Les prêts aux promoteurs immobiliers ont confortablement progressé de 7,5 %, culminant à 56 milliards de dirhams à fin septembre. Néanmoins, le secteur demeure sous pression, notamment en raison du report de nombreux projets. Les crédits à l’habitat, en revanche, n’ont évolué que de 1,9 %, une performance qui paraît modeste aux yeux de la moyenne annuelle de 4,4 % enregistrée entre 2015 et 2022. Ce ralentissement peut être attribué à l’attentisme des potentiels acquéreurs, inquiets de la hausse du coût de la vie et des taux d’intérêt, malgré l’instauration en 2024 d’un nouveau programme d’aide directe au logement. Dans ce contexte, le financement participatif apparaît comme une option prometteuse, enregistrant une croissance significative de 13,7 %, atteignant presque 10 % de l’ensemble des crédits à l’habitat.
Crédits à la consommation : des ménages sous pression
Depuis 2023, les ménages marocains se confrontent à une pression sans précédent sur leur capacité d’endettement, alimentée par une inflation galopante qui mine leur moral, désormais au plus bas historique. Même si un léger rebond se dessine au troisième trimestre 2024, les crédits à la consommation n’évoluent que de 1,1 %, totalisant 58,4 milliards de dirhams, un reflet d’une consommation résolument prudente face aux réalités budgétaires accablantes. Les facilités accordées aux entreprises publiques flambent de 14,9 %, tandis que les facilités de trésorerie montrent une hausse impressionnante de 57 %, bien que les crédits d’équipement aient connu un fléchissement de 8,3 %. Du côté des entreprises privées, une progression de 2 % est observée, soutenue par une montée de 9,4 % dans les crédits d’équipement et de 1,6 % pour les facilités de trésorerie.
Par secteur d’activité, les branches du « bâtiment et travaux publics » (+22,4 %) et de « l’électricité, gaz et eau » (+11,3 %) affichent des niveaux de progression remarquables, contrastant de manière frappante avec les diminutions rencontrées dans le « commerce et réparation automobile » (-5,9 %) et les « industries manufacturières diverses » (-7,6 %). Malgré cette tendance positive, les créances en souffrance sont en hausse de 3,4 % en septembre, portant le ratio à 8,6 % de l’encours total des crédits. Ce ratio grimpe à 12,6 % pour les entreprises privées non financières et atteint 10,7 % pour les ménages, des indicateurs alarmants des défis continus dans la gestion des risques de crédit.
Les perspectives de croissance pour les crédits bancaires se dessinent sous un jour prometteur pour 2024 et 2025, avec des prévisions de performances dépassant celles du PIB (+2,4 points en moyenne), grâce à des investissements d’une ampleur considérable, selon les experts de Attijari Global Research. Effectivement, des projets colossaux comme la mise aux normes des infrastructures en vue de la Coupe du Monde 2030, la transition énergétique, la réhabilitation d’Al-Haouz suite au tremblement de terre et le développement de nouvelles infrastructures autoroutières et ferroviaires stimulent un besoin crucial en financement. Avec un plan d’investissements estimé à environ 1 000 milliards de dirhams d’ici 2030, le secteur bancaire marocain se positionne comme un acteur clé dans le financement de cette transition structurelle.